Le domaine

Malheureusement les réalités commerciales et administratives tempèrent de beaucoup l’enthousiasme que procure l’agriculture. Si je pouvais, chacune de mes parcelles serait un jardin dans lequel je passerais plus de temps.

Les principes de base sont de ne pas retourner le sol pour ne pas bouleverser les horizons, décompacter régulièrement pour laisser s’unir le ciel et la terre, parfois « casser » un rang depuis longtemps enherbé pour incorporer au sol la matière organique accumulée. L’idée reste avant tout que le sol soit autant que possible occupé par des végétaux afin de le fixer : les engrais verts sont une formidable solution dans ce domaine.

Plusieurs passages au raz des ceps permettent de freiner la concurrence sans entièrement la détruire. En effet si la vigne souffre de cette présence, elle apporte en retour "phyto et zoo diversité" biologiques qui tendent à diminuer la pression des ravageurs. En outre le sol est bien meilleur là où la flore à repris ses droits apportant au sol matière organique donc humus, cohérence donc perméabilité et rétention de l’eau. Et cette disponibilité partagée entre différentes essences, dont la vigne, oblige cette dernière à plus d’efforts d’enracinement conduisant à une résilience et une acquisition du terroir renforcée.

Alors certes ma vigne est moins poussante et de fait, je ne la rogne plus. Or le rognage ou écimage, qui consiste à couper les sarments poussants au-delà du palissage, génère plaies, stress, tassage des sols et autres traumas. Ma vigne est moins stressée ainsi, elle produit de l’ombre et suis un cycle plus harmonieux. Toujours dans l’écoute du végétal, je marcotte autant que possible avec de très bons résultats. La vigne est une liane qui possède la capacité de s’étendre dans son environnement en s’enracinant loin de son pied mère via ses branches. Ce faisant, on obtient un organisme plus résistant, occupant plus de sol et de ciel, capable d’une conquête de territoire théoriquement sans limite tant que l’eau reste disponible. Je rêve d’un rang entier constitué d’un seul organisme s’étirant sur 150 mètres par exemple. Pour ce faire, je taille moi-même les parcelles les plus anciennes, les récolte à la main pour n’y rien abîmer et confie les parcelles plus jeunes à des entreprises de prestations dont j’exige un certain niveau de compétences.

Enfin il faut en parler, on pense souvent que produire en agriculture biologique c’est « ne rien mettre du tout » ce qui n’est techniquement pas possible au sein d’une monoculture. En effet rassemblez plusieurs membres d’une même espèce au sein d’un milieu et vous aurez immanquablement la visite de leurs parasites et ravageurs. Toutefois tout comme il est possible de régulièrement se laver au savon plutôt qu’à l’eau de Javel pour prévenir les infections chez un être humain, nous vignerons AB, utilisons des produits de traitements de contacts (qui ne pénètrent pas dans la plante contrairement au conventionnel) destinés à empêcher les champignons de se reproduire sans pour autant les tuer, et issus de substances naturelles donc biodégradables. A chaque pluie de plus de 20-25 mm, je renouvelle le traitement qui aura été lavé afin de protéger à nouveau les organes de la plante. La contamination zéro n’existe pas et n’est pas souhaitable. Aucun organisme n’apprend à se défendre en l’absence de son pathogène.

Pour finir nous subissons clairement le changement climatique. Sècheresse, ensoleillement exagéré, nouveaux ravageurs, diminution de la biodiversité et bientôt irrigation. Tous ces signes nous parlent de la désertification potentielle de nos régions. Ma réponse est minuscule mais j’y crois : actuellement poussent des arbres dans certaines de mes parcelles et cela me semble répondre à plusieurs problèmes précédemment cités : de l’ombre pour contrer le soleil, de la biodiversité supplémentaire, des apports de matière organique à la vigne, un décompactage des sols et un meilleur accueil de l’eau, une protection contre les méchants coups de vent, orages et grêle qui punissent tant de vignerons chaque année et qui sait un jour, la disparition ou l’évolution du palissage en réaction à ses arbres.

Bref de très belles pistes pour l’avenir.

Le domaine est une ancienne ferme, c’est-à-dire que tous les bâtiments sont liés entre eux afin qu’une famille puisse y vivre tout en préservant l’intimité de chacun.

C’est ce que vous propose la Bertrande grâce aux deux gîtes du domaine, respectivement connus sous le nom de Petit et Grand gite. Chacun d’eux tourne le dos à l’autre, possède son propre jardin et son indépendance. Seule la petite mais bien agréable piscine se trouve partagée entre les deux maisons. Ainsi plusieurs familles peuvent y passer des vacances, favorisant ainsi les rencontres sans les forcer.

La philosophie du lieu est de vous permettre de prendre le temps, de ressentir la présence de la nature, de cuisiner vos repas, de vous isoler au besoin, de jouer en famille, de lire, d’oublier l’existence des chaines d’infos en continu et de mettre au programme toutes ces petites choses dont le quotidien au flux tendu nous prive.

Cette douceur de vivre, c’est celle que j’ai immédiatement ressentie lorsque j’ai quitté Paris pour poser mes bagages en ce lieu, en 2009. Cette sensation délicieuse d’être toujours en vacances, de travailler même en vacances, notion traitresse s’il en est pour quelqu’un qui vivait sur son lieu de travail, offre malgré tout le privilège d’un quotidien de carte postale du Sud-Ouest. Chaque retour en ville me le rappelle d’ailleurs brutalement revigorant souvent le projet parfois fragilisé que constitue le fait de vivre si isolé à la campagne.

Les salles de réceptions sont elles nées du temps où mon ex-épouse et moi avions bâti une association culturelle en milieu rural, avant tout pour les comédiens amateurs que nous sommes, puis pour les autres afin d’ouvrir à différentes pratiques artistiques. Désormais partie avec sa fondatrice, l’association a laissé la place aux mariages de jeunes couples pleins de promesses. Ça n’a l’air de rien, pourtant j’assure que les bonnes énergies dégagées par tous ces événements nourrissent le domaine et son vigneron.

Les événements pros du type séminaires et conférences nourrissent plutôt l’économie du lieu quoique de belles rencontres se fassent dans tous les contextes. Sachez que quelque soit votre projet, je vous invite à venir en parler car tout se discute.